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L’exploitation sexuelle des enfants/jeunes filles en contexte de grands travaux d’infrastructures au Cameroun : le silence complice de la coopération internationale

L’exploitation sexuelle des enfants/jeunes filles en contexte de grands travaux d’infrastructures au Cameroun : le silence complice de la coopération internationale

Document rédigé par : Dr TAKOUGANG DAMLAMBENG Gervais Enseignant chercheur en Science Politique et Protection Sociale et DJATCHA NZEPA Stériane Larissa Experte en Protection de la jeune fille

Introduction

 La vision du document de Politique Nationale de Protection de l’Enfant se décline comme suit : « Tout enfant Camerounais sans discrimination ou vivant au Cameroun bénéficie de mesures de protection lui garantissant la pleine jouissance de ses droits
fondamentaux et un développement harmonieux, en vue de constituer un capital humain capable de soutenir l’émergence du pays à l’horizon 2035 » (DPNPE : 48). Cette orientation stratégique cadre avec les valeurs communautaires camerounaises tendant à développer des systèmes permanent de protection des enfants. Il est considéré comme l’avenir de la famille et de la communauté. Il procure un sens et un droit d’appartenance à la communauté pour ses parents, un sens d’autoréalisation et de fierté personnelle. À cet effet, la charge de l’éducation de l’enfant incombe non seulement à ses parents biologiques mais aussi aux autres parents de l’environnement immédiat. Le document de Politique Nationale de Protection de l’Enfant déclare à cet effet : qu’en Afrique en général et au Cameroun en particulier, l’enfant est considéré comme un être essentiellement vulnérable et dépendant, dont le développement et la survie nécessitent l’attention et l’assistance des parents et de la communauté. Est considéré comme enfant conformément au DPNPE, à l’article 1 de la Convention relative aux Droits de l’Enfant (CDE) et l’article 2 de la Charte Africaine des Droits et du Bien-Être de l’Enfant (CADBEE), « tout être humain âgé de moins de dix-huit ans ». Il représente selon le Rapport EPT du Cameroun 2015, 49,9% de la population totale. La situation « initiale » de définition de la condition de l’enfant est caractérisé par l’existence d’un ensemble de régulateurs tant au niveau communautaire, institutionnel, que légal. Il est à noter que les articles 343-44 et 343-2 du Code pénal camerounais interdisent et répriment les rapports sexuels moyennant rémunération soit en argent, en nature ou toute forme de promotion sociale. Les enjeux en matière de protection des enfants se forment autour des prises de positions telles : « Il n’existe pas de causes humaines plus dignes que celle de la défense et de la promotion des droits et de l’avenir des enfants qui, selon la Bible, sont héritage de Dieu».
Toutefois, il apparait à l’épreuve des faits au fil du temps un ensemble de réalité contraire aux volonté affichées et régulièrement réitérées. De façon chiffrée, le rapport du Cameroun aux observations du Comité de la CADBEE indique que, 2168 enquêtes ont été diligentées, 1675 procédures d’information judiciaire ont été ouvertes pour des infractions d’outrage à la pudeur sur des mineures de moins de 16 à 21 ans entre 2010 et 2014. Les juridictions de jugement ont été saisies dans 1013 cas et ont prononcé 749 condamnations et 143 acquittements. Plus grave encore, il ressort que dans les cas de viol, 1127 enquêtes ont été ouvertes, donnant lieu à 494 poursuites à l’information judiciaire, à 414 poursuites devant les juridictions de jugement qui ont abouti à 293 condamnations contre 69 acquittements. Il ressort à cet instant, que les schémas de protection mis en place laissent transparaitre des possibilités d’abus et d’exploitation multiformes des enfants. La gestion de l’offre de services de protection sociale de l’enfant (0-18 ans), va progressivement faire face aux données statistiques faisant état de ce que de nombreux enfants sont contraint de se livrer à la prostitution au détriment de leur croissance, de leur éducation et de leur instruction. Selon l’étude pilote sur l’exploitation sexuelle commerciale des enfants au Cameroun, en 2004, il existe 4000 enfants âgés de 11 à 17 ans qui pratiquent le commerce du sexe. La majorité soit 98.6% sont des filles contre 1.4% de garçons. Les questions de la prostitution des enfants, des abus sexuels, de La violence vont progressivement prendre place dans l’espace public camerounais sur la forme de l’exploitation sexuelle des enfants. Si dans un premier temps il s’est agi d’une question marginale, il faut dire que l’hyper sexualisation progressive de la société camerounaise place aujourd’hui cette problématique au centre des priorités. À partir des contextes de grands travaux d’infrastructures, Pluriels Croisés par la présente communication entend attirer l’attention sur l’enrôlement de plus en plus violent et récurrent des enfants dans le cycle infernal de l’exploitation sexuelle. Au plan méthodologique, nous avons eu recours à l’ethnométhodologie, a l’analyse stratégique à l’analyses comparatives entre les sexes (ACS) pour explorer en profondeur, les pratiques des acteurs aux fins de mettre en exergue le sens et la représentation qui se construisent autour de l’exploitation sexuelle des enfants. Afin de mieux exprimer la trajectoire de Pluriels Croisses, il est nécessaire de partir d’un certain nombre de questions : Pourquoi des camerounaises de plus en plus jeunes (12 ans ou même moins) sont dans les circuits de la vente du sexe et de l’exploitation sexuelle ? D’où vient-il qu’en dépit de la réglementation (Légal, institutionnel, communautaire) « la vente du piment » avec son lot de conséquence est devenue une des activités préférer des jeunes/enfants au Cameroun ? Pour tenter de répondre à ces interrogations, les hypothèses suivantes sont retenues : Tout d’abord l’inscription des enfants dans le cycle de l’exploitation sexuelle est une tentative de survie au plan socioéconomique pour les enfants des parents laissés-pour-compte de l’économie formelle ensuite la recomposition des liens sociaux avec pour corollaire la perte des repères culturels des principaux acteurs du système a changé la perception que l’on avait de l’enfant et de son rôle. L’absence de système adéquat de protection a favorisé le développement de ces pratiques, leurs inscriptions dans l’agenda des pratiques des enfants, leurs normalisations, et leurs prises en compte comme une activité marchande « normale ». Du coup, Pluriels Croises entend défendre l’idée selon laquelle l’exploitation sexuel des enfants est en pleine essor au Cameroun, et qu’avec les contextes de grands travaux d’infrastructures qui se mettent en place, si rien n’est fait cette pratique attendra sa vitesse de croisière au grand-dame de la vision exprimé dans le DSCE selon laquelle : « …la lutte contre les discriminations sociales sera intensifiée et l’approche vulnérable intégrée dans toutes les politiques de développement afin de récupérer en permanence les segments sociaux vulnérables ou marginalisés par la croissance ».

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